Synthèse Mmes Slim et Naboulsi

Synthèse

Mmes Ilham Slim-Hoteit et Randa Naboulsi

 C’est pour nous un très grand honneur et un réel plaisir de clôturer ce colloque international portant sur « Le plurilinguisme dans l’enseignement au XXIème siècle: atouts et défis ».

Tout d’abord un grand merci à tous les intervenants et à tous les participants qui ont accepté de nous faire partager leurs expériences. Nous avons assisté à plusieurs débats, ateliers et conférences portant sur des thèmes complémentaires et différents, attenant à une même thématique « Le plurilinguisme».

La première séance plénière a été consacrée aux réformes des curricula de formation universitaire et leurs adaptations aux besoins linguistiques du marché du travail.

Langues et employabilité animée par Monsieur Hervé Sabourin et Monsieur Mohamed Embarki, a abordé les représentations des langues chez les jeunes francophones et le rôle des langues dans l’insertion professionnelle dans le Monde Arabe.

La deuxième plénière, animée par Mme Salam Diab-Duranton et Mme Rachida Dumas, a traité « la formation des enseignants dans les contextes plurilingues ».

Suite aux plénières, deux séances parallèles ont été réservées à la riche problématique des écrivains plurilingues. Les différentes communications ont cherché à comprendre la notion de plurilinguisme littéraire à travers l’expérience des écrivains francophones. Les intervenants ont tenté de percevoir comment les écrivains envisagent les différentes langues en présence et quels sont les rapports qu’ils entretiennent avec leur outil premier, langue maternelle classique (soutenue) et dialectale. Ils se sont penchés particulièrement sur les rapports entre langue(s) et littérature, langues et identité et sur l’idée de l’écrivain comme passeur de cultures.

Jean-Michel Nzikou a analysé dans sa communication l’expérience scripturale de l’écrivain congolais T Chicaya U Tam’si dans ses deux romans les Concrelats et Ces fruits si doux de l’arbre à pain. Il a mis l’accent sur sa façon d’envisager les différentes langues en présence dans sa production littéraire et les rapports entre langues et littérature. Une attention particulière est portée à sa posture auctoriale ou à sa manière de se faire passeur de cultures.

Les rapports aux langues et cultures et les questions identitaires, l’identité pluriculturelle ou l’identité double en construction sont abordés par deux intervenantes, Mme Faten Kobrosli qui a travaillé sur Dans la paix, l’amour et rien d’autre de l’écrivaine Libanaise Ezza Agha Malak et Mme Sarah Kouaider-Rabah qui a analysé le roman de Rosie Pinhas – Delpueche Les suites bysantines.

 Mme Franceline Daher-Planche, a traité les dimensions interculturelles des enseignements spécialisés en master de didactique de la langue Française : l’étudiant doit connaître la culture de l’autre et l’interpréter notamment la culture française. Mais il doit, pour commencer, connaître sa propre culture à travers la langue de l’autre pour penser et parler l’interculturel: l’œuvre de l’écrivain libanais Alexandre Najar a servi de corpus à cette étude.

 Mme Mériem Zeharaoui, a étudié Dans le cadre de sa communication, le rapport à la langue française qu’entretient l’écrivaine sénégalaise Fatou Diome, dans son premier roman Le ventre de l’Atlantique, thématisation de la langue française et recours à la langue maternelle, faisant apparaître ce que l’on pourrait nommer une « écriture mixte ».

 Mme Dalia Khraybani, a décrypté les différentes figures du métissage dans Tribulations d’un bâtard à Beyrouth de l’écrivain libanais d’expression française Rami Zein, elle a démontré comment le métissage, générateur d’une identité hybride se propose comme solution à la crise identitaire endurée par le personnage principal du roman.

 Mme Carole Ajami, a traité dans un premier temps son rapport à la langue française en tant qu’écrivaine libanaise d’expression française puis elle a exposé son travail de recherche en tant que doctorante à l’UL, son choix d’écrivains de langues et cultures différentes pour son corpus, leurs rapports au français : les questions de plurilinguisme, de pluri-culturalité et identité constituent des centres d’intérêt pour sa recherche.

 Mme Amal Ammar, s’est penchée sur les difficultés de l’apprentissage de la lecture en s’appuyant sur les conclusions des recherches les plus récentes relatives au travail sur le code, la conscience phonétique et le lien entre lecture et écriture.

Après ces deux séances parallèles, deux séances consécutives ont été consacrées à « La formation initiale et continue des enseignants dans les contextes plurilingues : disciplines linguistiques (DL) et disciplines non linguistiques (DNL) ».

 Mmes Randa Naboulsi, et Ilham Slim-Hoteit ont traité la « Maîtrise du français langue véhiculaire des savoirs disciplinaires, chez des futurs enseignants des sciences, dans un contexte plurilingue au Liban ». Le recours à l’arabe dialectal libanais est récurrent dans des situations d’interaction orales dans les classes des disciplines non linguistiques. A partir d’une étude des besoins langagiers émanant du terrain, elles ont essayé de définir le niveau du français requis chez de futurs enseignants des sciences.

 M. Stéphan-Ahmad Hafez et Mme Nada Basbous ont ciblé dans leur communication «les cours bilingues dans les disciplines scientifiques. Le cas des cours de biologie au Département d’éducation physique et sportive de la Faculté de Pédagogie ». A partir des enquêtes de terrain, d’observations de classes et d’analyse des supports de cours, les auteurs ont étudié la façon dont les cours sont préparés, organisés et animés dans ces DLN et ils ont réfléchi à un plan d’action pour des cours de disciplines bi /trilingues complémentaires et contextualisés.

 Mmes Souheir El Haj et Hiam Daou, dans leur communication « Le plurilinguisme : une entrée pour la remédiation aux erreurs portant sur l’emploi des pronoms », ont analysé les productions écrites en langue française des apprenants, ont remarqué que l’emploi erroné de plusieurs catégories et fonctions grammaticales, surtout celle des pronoms, pourrait être imputé à l’interférence de la langue maternelle. Ce qui les a poussées à se demander dans quelle mesure l’entrée comparative, ou “conjointe”, par la syntaxe des deux langues (LM et LE) pourrait remédier aux erreurs syntaxiques des apprentissages dans ce domaine. La méthode suivie sera celle de l’analyse des erreurs qui devra conduire à proposer une syntaxe de remédiation répondant aux besoins des étudiants.

 Mme Nada Abdallah, a essayé de présenter les domaines d’usage du français dans le contexte libanais vis-à-vis des pratiques de l’arabe ou « des arabes ». Une comparaison entre les manifestations des langues d’usage est menée suite aux résultats du« projet DUFRAM ».

La 7ème et dernière séance a été également consacrée à « La formation initiale et continue des enseignants dans les contextes plurilingues »

Mme Radiah Haddadi, Dans un contexte algérien plurilingue par excellence où se concrétisent les politiques linguistiques entretenues par l’Etat ainsi que les conflits linguistiques générés. Cette contribution a mis l’accent, à partir d’une enquête de terrain, sur les problèmes d’apprentissage de FLE, notamment ceux liés à la prononciation chez les apprenants algériens. les causes des carences en prononciation du français sont dues incontestablement et en partie intégrante à la dissimilarité des deux systèmes phonologiques (arabe et français) et pourraient aussi être en rapport avec les représentations sociolinguistiques de cette langue.

 Mmes Souad Saidoun et Imane Ouahib se sont intéressées aux difficultés liées au traitement de l’implicite, chez les lycéens algériens, lors de la lecture d’un texte littéraire. Partant d’un constat sur le terrain, elles ont remarqué lors de la lecture du texte littéraire que de nombreux lycéens peinent à interpréter l’implicite. Ce constat nous a amené à se poser les questions suivantes : Quelle place accorde-t-on à l’enseignement des inférences au cycle secondaire ? et comment favoriser l’enseignement des inférences ? Cette recherche vise à approcher les pratiques enseignantes pour décrire ce qui se fait dans le traitement de l’implicite et à proposer un dispositif qui favoriserait l’activité inférentielle.

 Mme Wajiha Smaili, a montré que l’une des principales manifestations du bi-plurilinguisme dans le système scolaire libanais c’est l’enseignement précoce de deux ou plusieurs langues dès l’entrée de l’élève à l’école. L’étude de Mme Smaili a porté sur une analyse des manuels de la première classe de primaire (EB1( d’arabe et de français les plus utilisés dans les écoles libanaises (publiques et privées). Elle a dans un premier temps déterminé les compétences de base pour entrer en lecture, elle a ensuite conçu une grille d’analyse des manuels à partir des compétences déterminées, des grilles d’analyse des manuels de langues et une prise en considération de la réalité du terrain. La présentation s’inscrit dans la perspective d’une didactique intégrée des langues dans un contexte plurilingue.

 Mme Hoda Koteich, Plusieurs études et statistiques ont confirmé que les libanais parlent plusieurs langues, dont récemment le rapport élaboré suite aux données collectées dans le cadre d’un projet international portant sur les Dynamiques des Usages, de la transmission et des représentations du Français dans l’espace Arabo-francophone au Maghreb et au Moyen-Orient (DUFRAM).

Les résultats ressortissant de ce rapport prouvent, par les chiffres, la cohabitation de plusieurs langues dans les pratiques socio-langagières des libanais, où plusieurs facteurs (psychologiques, sociologiques, linguistiques, culturels et cognitifs) entrent en jeu.

Il s’agit principalement des trois langues : l’arabe (avec toutes ses variantes), le français et l’anglais. L’anglais dont la présence était timide dans la société libanaise, réussit à y trouver place, mais sans pour autant supplanter le français, comme c’est généralement le cas actuel dans le milieu éducatif libanais.

La Table Ronde en plénière animée par Mme Sophie Nicolaïdès-Salloum a traité « Contact des langues : les français en francophonie »

Intervenants : M. Serge Borg, M. Hayssam Kotob, Mme Rachida Dumas, M. Youcef Arrif, M. Jean-Michel Nzikou, M. Adil El Madhi.

Le français est une langue universelle partagée par des locuteurs venus des quatre coins du monde. Et comme une langue est une culture, elle s’enrichit grâce aux apports des autres langues et elle enrichit, à son tour, les langues en contact avec elle.

Que faut-il faire des mots ou expressions produits des cultures francophones ? Faut-il les intégrer dans la langue française ou juste les signaler comme des mots exotiques ? A quel point le français répond-il aux besoins de ses interlocuteurs dans l’espace francophone ?

Si la langue française tient à rester une langue universelle, elle doit faire preuve de souplesse.

Pour terminer, il est intéressant de noter que cette synthèse a fait suite à la synthèse conjointement élaborée par M. Serge Borg et Mme Salam Diab-Duranton.